L’art à l’école en quête de reconnaissance

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pratiques artistiques : un contour un peu flouQue dit le désormais fameux « socle commun des compétences » qui définit les compétences que les élèves doivent maîtriser à l’issue de la scolarité obligatoire ? A propos de l’enseignement de l’art, rien. Ou si peu. Tout juste précise-t-on au chapitre 5, qui définit la Culture Humaniste, qu’elle « se nourrit des apports de l’éducation artistique et culturelle ». Bien vague, trop vague pour constituer un projet. Quant au dernier rapport sur l’avenir de l’école (rapport Thélot), dévoilé en 2004, il ne dit pas un mot sur ce thème. Concrètement, où en est l’enseignement de l’art à l’école ?  

Les textes disent qu’il doit occuper 3 heures par semaine en primaire. Dans la réalité, c’est loin d’être le cas. Quant au collège, il accorde en général 2 heures par semaine à la musique et aux arts plastiques mais, dans la plupart des cas, pas de théâtre, pas de danse, pas de cinéma, pas même de dessin. Pourtant, en théorie, chacun s’accorde à reconnaître ce que l’apprentissage de l’art peut apporter à un enfant, à un futur adulte citoyen. Chacun pourrait faire siens les mots de Robin Renucci, comédien et surtout grand défenseur de l’art, en préface de l’ouvrage de Jean-Gabriel Carasso, ex-directeur de l’Association Nationale Théâtre et Education intitulé Nos enfants ont-ils droit à l’art et à la culture ? : « Contre la violence et l’incivilité, contre les racismes, les arts et la culture peuvent contribuer à créer une école de la tolérance et du respect de l’autre. Les règles de l’art sont également celles de la vie ».

 Seulement voilà, concrètement, on n’y arrive pas. Les raisons en sont multiples, au-delà de la simple volonté – ou de son absence – des institutions et des professeurs. Là encore, on reparle de programmes et de classes surchargés, de professeurs mal formés, de manque de moyens financiers, de manque de lieux adaptés, de difficultés à harmoniser les rôles fractionnés de l’état, des communes, des départements et des régions. Lors d’une très récente rencontre organisée entre artistes, associations, hommes politiques et penseurs par le Forum Permanent pour l’Education Artistique (FPEA), Alain Kerlan, docteur en philosophie et professeur en université en sciences de l’éducation, soulève le paradoxe : «  Personne n’oserait dire que l’éducation artistique ne sert à rien. Il y a sur le sujet un apparent consensus des hommes politiques mais quand il s’agit de la mise en œuvre, c’est une autre affaire. Toutefois, ce consensus n’est pas négligeable. Il devrait permettre de sortir de la justification pour aller vers la légitimité de l’art et de la culture dans l’éducation. Il faut renverser l’image de discipline secondaire. Cet apprentissage est au contraire une base d’éducation et même une éducation de base. » Dès lors, comment sortir de l’impasse ?

 

« Les enseignants devraient percevoir qu’au-delà de leur rôle d’enseignant, maître d’une discipline à transmettre, ils héritent d’un devoir d’éducation, plus large et plus complexe, dont la dimension artistique est essentielle. » J.G Carasso

Une approche sensible

D’abord, sans doute, en considérant une fois pour toutes que l’art n’est pas une « matière » de plus, pas un « aimable divertissement qui viendrait, au mieux, en complément ludique des apprentissages dits fondamentaux » comme le déplore Jean-Gabriel Carasso. En rejetant sans doute aussi deux tendances répandues : celle qu’il est et sera toujours réservé à une élite, celle aussi qui « réserve l’art et la culture dans l’éducation, telle une béquille pour handicapés sociaux, aux seuls jeunes en difficulté, Zepreux – comprenez élèves de ZEP – exclus de la réussite scolaire autant que sociale, analphabètes et autres illettrés ».

Précise encore cet homme de théâtre, comédien et metteur en scène qui, depuis près de 40 ans, conjugue une pratique théâtrale personnelle, un travail de formation pédagogique, un militantisme jamais démenti et une croyance qu’il aime à développer : «L’initiation à la pratique d’un art, la fréquentation des œuvres, dès lors qu’elles ne s’inscrivent pas dans une course à la performance ou dans un consumérisme insensé, peuvent constituer une formidable école du développement personnel. » A son sens, un apprentissage intelligent de l’art se résume en trois verbes : faire, éprouver, réfléchir. Il argue du fait que les enfants, d’instinct, dès leur plus jeune âge, s’approprient le monde et que c’est cette approche concrète dans l’action qui est la première approche indispensable de l’art. Puis vient le fait d’éprouver des sensations en étant le plus tôt possible en contact avec un maximum d’œuvres, qu’elles soient musicales, picturales ou théâtrales. Il faut ensuite pouvoir réfléchir avec recul sur une œuvre, sur un travail personnel.
 

Pour lui, faire entrer l’art à l’école, c’est d’abord former les enseignants à conduire des activités de ce type, former aussi les artistes qui travailleront avec eux sur les enjeux d’un projet. « Dès leur formation initiale, en IUFM ou en université, tous les futurs enseignants devraient pouvoir découvrir l’intérêt de ces aventures, comprendre leur fonction dans ce type d’activité, acquérir quelques compétences propres et mesurer les possibilités offertes par l’environnement artistique et culturel pour mener à bien des projets en partenariat. » Autre urgence selon lui, une clarification du qui fait quoi ! « Les cadres juridiques existent, ce sont les Contrats éducatifs locaux, les Conventions, les Chartes et autres Protocoles de développement culturel. L’essentiel est de concevoir, aujourd’hui, que l’éducation culturelle et artistique ne peut relever que d’une responsabilité institutionnelle partagée. Donc que soient mis en place les outils et les moyens de ce partage. Que chacun perçoive cet enjeu et nous aurons fait un grand pas ! » A bon entendeur, salut !

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