Internet : Des mesures insuffisantes

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Christian Gautellier est, entre autres responsabilités, vice-président du CIEM (Collectif Associatif Enfance et Médias) dont la vocation est l’éducation aux médias et qui s’est donné pour objectif de créer une vrai dynamique pour sensibiliser les pouvoirs publics sur les enjeux des médias, non seulement pour les enfants mais aussi les éducateurs, les parents, bref, tous les citoyens, en somme. Il nous livre ses convictions sur internet.

Des mesures insuffisantes

C.M : Pouvez-vous nous préciser quel est le rôle du CIEM et particulièrement concernant les enfants et Internet ?

C.G : Grâce à ce collectif, nous avons plus de poids pour nous faire entendre. L’objectif de ce regroupement est avant tout d’essayer de créer un rapport de force à la fois vis-à-vis ou à côté des pouvoirs publics, au sens large du terme, que ce soit avec le ministère de la culture, avec le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel ou certains services du Premier Ministre et surtout face aux éditeurs, aux diffuseurs, comme lors d’une récente journée de colloque où nous avons pu faire avancer le dialogue avec les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d’accès à Internet…

Hélas, les éditeurs eux-mêmes et les diffuseurs n’étaient pas représentés. Internet est aujourd’hui le média qui conduit tous les autres, il aurait fallu que soient aussi présents des opérateurs de télévision. Quand on parle d’Internet et de l’enfance, cela met en jeu beaucoup de responsabilités.

L’engagement des F.A.I.

C.M : Depuis le 1er avril dernier, la quasi-totalité des fournisseurs d’accès à Internet proposent gratuitement des logiciels de contrôle parental. Est-ce un progrès notoire ?

C.G : Le fait que ces logiciels soient désormais proposés gratuitement est une bonne chose. Quant à la facilité d’installation ou à la fiabilité de ces produits, il reste encore beaucoup à faire ! Et puis il y a des questions de compatibilité avec les systèmes intégrés. Ce n’est pas si simple que cela. Ca peut être un bon outil pour les plus petits. Pour les ados, il faut plus, et notamment des démarches d’éducation aux médias. Et puis il faut envisager ce problème d’une façon plus globale, en termes de « qualité des programmes ». Il y a encore beaucoup trop de contenus illicites.

Et les opérateurs ne peuvent pas se considérer que comme des « tuyaux » absolument irresponsables de ce qui passe dedans ! Les familles sont responsables bien sûr, l’école aussi, l’état aussi mais les éditeurs le sont également parce qu’Internet, dont certains vous diront que ce n’est pas un média conçu pour les enfants, ce qui est vrai puisque sa genèse est militaire, est néanmoins devenu, de fait, un espace public et personne ne peut continuer à faire l’autruche. Il faut mettre tout le monde autour de la table et chacun a sa part de responsabilité. Internet ne peut pas être une zone de non droit. C’est très compliqué à règlementer mais il faut mettre tout le monde autour de la table.

D’Internet à l’international

C.M : Est-il possible de légiférer sur un média dont les contenus arrivent de toute la planète en ordre dispersé ?

Bien sûr, ce n’est pas évident et nous n’en sommes qu’aux prémices des débats. Néanmoins, en France, la loi existe, elle est assez précise. Il faut maintenant réfléchir aux moyens de la faire appliquer. Claire Brisset, Défenseur des Enfants pendant 6 ans jusqu’en mai dernier, a largement rappelé la loi Perben du 9 mars 2004 relative à la « lutte contre la délinquance sexuelle et la protection des mineurs » et elle suggérait la création d’une instance compétente pour l’ensemble des médias afin d’uniformiser les règles de contrôle et les critères de protection des mineurs.

 Nous adhérons complètement à cette idée. La Convention Internationale des Droits de l’Enfant dit aussi bien des choses. Nous ne manquons pas de textes sur lesquels nous appuyer pour faire avancer les choses dans le bon sens. Et à ceux qui nous rétorquent qu’Internet étant un nouveau média et que ce que nous demandons est techniquement impossible, nous répondons que la télévision a bien réussi à le faire et que, même si c’est très compliqué, l’enjeu pour nos enfants est essentiel.

 C’est un problème de santé publique ! Il serait impensable de consacrer des budgets publics d’éducation importants pour transmettre aux jeunes un certain nombre de valeurs de civisme, de respect de l’autre et de laisser, dans le même temps, un média aussi important qu’Internet dans leur vie véhiculer tout et n’importe quoi !

Internet : les associations se mobilisent

Parmi les nombreuses associations qui se penchent sur les dangers d’internet, e-enfance a été créée pour aider les enfants à communiquer en toute sécurité, qu’il s’agisse d’internet, du mobile ou des jeux en réseau. Le site, assez succinct mais très clair, leur explique à quels risques ils peuvent être exposés et comment s’en prémunir.

 A leur adresse, des propos simples sur les images choquantes, les addictions et les mauvaises rencontres. En collaboration avec Microsoft, e-enfance a aussi créé le site www.decodeleweb.com, très convivial, très graphique, qui répond le plus sérieusement du monde mais avec humour et punch à leurs questions (et à celles de leurs parents) quant à l’utilisation de la communication électronique. A consulter aussi, sur le site www.tfou.fr également recommandé par e-enfance, l’espace parents, plein de bons conseils.

Dans un autre registre, une initiative remarquable : celle de l’association l’enfant@l’hôpital, créée il y a vingt ans, au moment où les ordinateurs font une première percée dans les salles de classe. Depuis que de chemin parcouru ! L’association est présente dans nombre d’hôpitaux parisiens, franciliens et dans les grandes villes de province, offrant aux enfants malades des contenus de qualité et interactifs qui constituent une belle alternative à la télévision, très présente en milieu hospitalier.

En 2005, l’association a reçu le Prix Planète citoyenne décerné par France Info et le magazine La vie. Aujourd’hui, elle vient de lancer un groupe d’expertise pour mieux apprivoiser internet à l’hôpital et ainsi protéger en particulier les enfants affaiblis par la maladie tout en leur offrant cette formidable fenêtre sur le monde qu’est internet. Participent à ce groupe d’expertise des enseignants, des pédopsychiatres, des infirmières, des parents d’enfants malades, des représentants d’IBM et de l’institut Curie… A suivre…

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