Quand on parle de l’hygiène à l’école, on pense immédiatement aux sanitaires insalubres, ancrés dans notre mémoire d’élèves traumatisés, mais l’hygiène va bien au-delà de la porte des toilettes, elle concerne aussi les dispositifs mis en place pour une hygiène simple mais efficace. Certaines règles élémentaires ne sont pas toujours respectées. Manque de moyens financiers, de personnels d’entretien et/ou de surveillance, associé à un manque de bonne volonté de la part des élèves eux-mêmes, les raisons sont nombreuses, les conséquences le sont tout autant.
Ces petits maux qui en disent long
Infections urinaires, génitales, troubles mictionnels, constipations, maux de ventre d’un côté, épidémies de gastroentérites, otites à répétition, rhumes, verrues plantaires, poux de l’autre… les répercussions d’une mauvaise hygiène sanitaire sur nos enfants sont réelles et multiples. Loin d’être gravissimes, nous sommes toujours un peu bouleversés de retrouver notre petit avec la goutte au nez, la culotte imprimée léopard ou avec des petits habitants sur la tête…
« Hygiène », une matière obligatoire à l’école
Maintenant que notre petit mange seul, qu’il joue dehors et va aux toilettes comme un grand, il est aussi en âge d’apprendre les quelques règles d’hygiène et de comprendre qu’il faut, le plus possible, se tenir à distances des microbes. On le sait, un enfant apprend beaucoup par mimétisme, il reproduit généralement le comportement de ses parents. N’hésitez donc pas à servir de modèle ! Et si l’apprentissage de l’hygiène est inscrit dans les programmes scolaires, l’éducation se fait aussi à la maison.
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Interview de Sylvie Denambride, professeur des écoles.
Côté Mômes. L’apprentissage de la propreté, le respect des règles d’hygiène font parties des notions fondamentales enseignées dès la maternelle. Quelles sont vos méthodes ?
Sylvie Denambride. En début d’année, je consacre beaucoup de temps à cet apprentissage pour que les enfants prennent de bonnes habitudes. Exemples: tirer la chasse d’eau, se laver les mains… et plusieurs fois par jour, je passe dans les toilettes pour voir si les consignes ont été respectées.
CM. Quand on aborde le sujet de l’hygiène à l’école, on pense immédiatement aux toilettes, à l’absence de papier, aux serviettes pour les mains trempées et douteuses, à l’odeur de chaussettes dans les salles, bref, depuis notre génération les choses ont-elles évoluées ?
SD. Depuis notre génération les choses ont évolué, même si ce n’est pas encore parfait; un lieu public reste toujours difficile à entretenir que ce soit chez les enfants ou chez les adultes.
CM. Le changement des dames de services en ATSEM a-t-il participé à cette évolution ?
SD. Je ne pense pas. Tout dépend des personnes et de la priorité qu’elles veulent bien accorder à cette notion d’hygiène et de propreté.
CM. L’hygiène est-elle une question de moyens financiers ?
SD. L’hygiène est en partie une question de moyens financiers, de temps accordé aux femmes de ménage et à l’équipement. Mais c’est aussi une question d’éducation. L’année dernière dans l’école où j’enseigne, nous avons fait une campagne sur la propreté des toilettes afin de « resensibiliser » les enfants à cette notion. Chaque classe avait fait un panneau pour rappeler les règles d’hygiène et tous les 15 jours un nouveau panneau était affiché dans les toilettes de la cour. Chaque enfant avait participé à l’élaboration du panneau de sa classe et en plus découvrait régulièrement un nouveau panneau réalisé par une autre classe. Le résultat avait été très positif. Je pense que la partie éducation est toute aussi importante que la partie financière.
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Hygiène : le tabou des sanitaires
Si les actions réalisées sur le thème de l’hygiène se multiplient à l’école, qu’il s’agisse de l’hygiène alimentaire, bucco-dentaire et autres, les sanitaires souffrent, quant à eux, d’un véritable problème : manque de propreté manifeste, odeurs, fermetures défaillantes des portes, absences de verrous, d’éclairage, de robinets, de savons, d’essuie-mains, bref du minimum vital. Il se pose un problème évident, qui pour une fois met moins en cause l’Education nationale que les municipalités (pour les écoles) et les départements (pour les collèges).
C’est à eux qu’incombe la mise à disposition d’infrastructures sanitaires et du personnel de service nécessaire au bon usage et à l’entretien de ces équipements. Le constat est lourd. Les équipements proposés ne répondent pas à la demande des enfants, le nettoyage entre deux récréations est insuffisant et les manques s’accumulent. Les conséquences médicales du non-respect d’un minimum d’hygiène corporelle sont réelles sur nos enfants, des effets pathologiques mais aussi psychologiques. Inconfort physique, maux de ventre, incapacité de se concentrer sur un devoir… Sans oublier que plus on grandit, plus les toilettes deviennent le QG de certains et certaines.
Toilettes insalubres : pénible pour nous, inadmissible pour eux
Admettons alors qu’il est difficile de trouver un minimum d’intimité lorsque les portes ne ferment plus, que les copines ou les bandes squattent les toilettes pour fumer ou téléphoner (deux interdits dans l’enceinte de l’école) et qu’en plus, le papier fait toujours défaut ! Ce que nous ne supporterions pas dans notre quotidien professionnel, nos enfants le vivent tous les jours à l’école. Il n’y a donc rien de surprenant au fait qu’un large pourcentage d’élèves se retient toute la journée et court aux toilettes dès leur arrivée à la maison.
Posons-nous la question, à quoi sert l’apprentissage des règles élémentaires de l’hygiène à l’école maternelle et primaire, s’il ne peut être mis en pratique au sein même des établissements tout au long de la scolarité ?
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Les toilettes de l’école : ce sont les enfant qui en parlent le mieux!
« Et pour toi, ça veut dire quoi l’hygiène à l’école ? » |
Eva, 6 ans, en CP « Ben à l’école, il faut toujours tirer la chasse quand on sort des toilettes et se laver les mains quand on va à la cantine. Et dans la cour, faut pas jeter de papiers. On n’a pas le droit ». Nina, 4 ans et ½, en moyenne section de maternelle « Ben c’est quand Madame Odette, elle nous dit de nous laver les mains à la cantine ! Louna et Fiona, jumelles de 4 ans ½, en moyenne section de maternelle « On peut pas se laver les dents après la cantine et y’a pas de lingettes pour nettoyer nos fesses après avoir fait « caca » et ça c’est trop NUL ! » Arthur, 11 ans, en CM2 « Je peux en parler, moi de l’hygiène à l’école ! Ca fait des mois que les toilettes sont bouchées et il n’y en a plus qu’une disponible. Et encore, c’est difficile d’y aller. L’autre jour, il y avait des grands du collège, de 6ème sans doute, qui bloquaient la porte. Ils s’étaient enfermés à l’intérieur pour jouer tranquille à la Gameboy et ils empêchaient tout le monde d’entrer. Alors je les ai poussés et j’ai fini par y arriver. Mais franchement, c’est pas drôle d’avoir à se battre pour aller faire pipi dans un endroit super dégoûtant en plus ! » Margot, 12 ans, en 5ème « Moi, ça fait des années que je ne vais jamais aux toilettes à l’école. C’est trop sale, il n’y a jamais de papier, pas de savon, on ne peut même pas se laver les mains parce qu’il n’y a rien pour les essuyer. On nous a expliqué que c’était par mesure de sécurité, qu’il n’y avait pas de serviettes ou de torchons pour éviter les étranglements avec le jeu de la tomate, mais comment on fait ? Eh ben moi, j’ai trouvé la solution : j’attends de rentrer chez moi et je me retiens le reste de la journée. Parfois j’ai mal au ventre mais c’est pas grave, je me suis habituée et puis je préfère encore ça à la saleté. » |