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La défenseure des enfants en voie de disparition ?

Au moment où l’on fête le 20ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, le gouvernement envisage la suppression du Défenseur des Enfants, institution indépendante dirigée depuis 3 ans par Dominique Versini. La défense des droits des enfants sera désormais englobée dans les missions d’un Défenseur des droits institué par la récente réforme constitutionnelle. Cette décision a provoqué un tollé au sein des associations et professionnels de l’enfance. Pourtant, certains d’entre eux ne voient pas matière à crier au scandale, bien au contraire.

Dominique Versini, Défenseure des enfants : « Personne ne sait à quoi sert le Défenseur des droits »

De l’Unicef à la ligue des droits de l’homme, nombreuses sont les voix qui se sont élevées pour tenter d’influer sur une décision qui doit encore être entérinée par la Sénat. L’appel à soutien de la Défenseure des enfants compte aujourd’hui 37 000 signataires et même Bertrand Delanoë, maire de Paris est récemment monté au créneau pour demander au gouvernement de retirer son projet. Dominique Versini, quant à elle, reste interloqué de la manière dont la décision a été prise. « Je l’ai appris de façon cavalière, je n’ai pas été consultée. Le projet a été élaboré entre l’Elysée et Matignon, or, le silence de l’Elysée et de Matignon est assourdissant. C’est terrible la politique Le Président de la République et le Premier ministre ont été mes collègues dans le gouvernement Raffarin. On a travaillé ensemble, on n’est pas des inconnus. Je m’occupe de la défense des enfants ; franchement ça ne porte pas vraiment atteinte au travail du gouvernement. Certes, j’ai pris position sur les enfants dans les centres de rétention mais elles étaient justes, j’ai pris position sur les tests ADN et ils reviennent dessus, je me suis exprimée sur le fichage des mineurs et j’assume complètement : on ne peut quand même pas ficher tous les gamins dès qu’ils commettent le moindre délit.» commente-t-elle.

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y a-t-il quelqu’un pour sauver les enfants ?

La plus grande crainte de dominique Versini : que les enfants en grande difficulté se retrouvent sans personne à qui s’adresser. « Aucun enfant ne pourra plus nous écrire, ils nous écrivent parce que ça s’appelle Défenseur des enfants. On est un médiateur institutionnel, on plaide pour les enfants qui ont des droits, on plaide aussi pour les enfants qui n’en ont pas, dont les droits ne sont pas reconnus en France. C’est ce qui fait la particularité qu’une institution administrative ne peut pas apporter. Notre indépendance, c’est la force des enfants. Je ne sais pas quelle est cette manie en France de créer des machines administratives. En 2000, quand le parlement a décidé de créer une institution spécialisée, il y avait un objectif qui était de montrer que pour la France, la défense des droits des enfants était vraiment importante. Nous sommes une instance de dernier recours. Nous intervenons quand les autres institutions n’ont pas vraiment fonctionné. Plus de 20 000 enfants ou leurs parents se sont adressés à nous depuis la création de l’institution ».

Un défenseur des Droits, pour quoi faire ?

Dominique Versini rappelle aussi que l’on fête cette année le 20ème anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant et que cette décision arrive à contre-courant des efforts enfin entrepris un peu partout dans le monde pour la cause des enfants. Et d’ajouter : « Je viens de prendre la présidence du réseau européens des défenseurs des enfants – il y en a 35 dans 28 pays – à l’occasion de notre assemblée générale annuelle. Ils m’ont largement apporté leur soutien et se disent que si l’on supprime le Défenseur des enfants en France, d’autres pays vont suivre. » Quand on lui parle des missions du Défenseur des droits, Dominique Versini ironise : « Quand le principe d’un Défenseur des droits a été voté et inscrit dans la Constitution, il n’a jamais été dit quel serait son rôle. Tout le monde est bien incapable de dire à quoi il sert… Et on ne sait même pas qui sera nommé à ce poste ! »

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Martine Brousse, présidente de la Voix de l’enfant : « Le Défenseur des droits aura plus de pouvoir »

 

Dès la création de l’institution du Défenseur des enfants, la Voix de l’enfant était contre ce projet, considérant qu’il y avait un médiateur de la République et qu’il fallait mettre en place une direction spécifique avec des gens compétents auprès du médiateur. Martine Brousse, présidente de l’association, s’explique : « La Défenseure elle-même a reconnu que son rôle était plus un rôle de médiateur que de défenseur. Le défenseur, c’est l’avocat de l’enfant. En France, on a tout ce qu’il faut pour ça, des juges, des avocats. Madame Versini est dans une position où elle ne peut rien faire pour les enfants. Or, elle ne parle que de son poste, elle ne s’est mobilisée pour son poste. J’aurais souhaité qu’elle se mobilise en faisant un appel à pétition pour une meilleure protection de l’enfance, et il y en a des raisons de se mobiliser en matière de maltraitance, d’enfants sans papiers, d’expulsions. J’ai été profondément choquée par ses propos déplacés, purement égoïstes, alors que la petite Marina mourrait de maltraitance dans l’indifférence. »

 

Les enfants n’appellent pas le 119

Martine Brousse enfonce le clou concernant l’institution de Dominique Versini : « Même le numéro vert, le fameux 119, les écoutants eux-mêmes disent qu’il y a très peu d’enfants qui appellent, ce sont les adultes qui appellent. Et de toute façon, pour saisir la Défenseure, il faut passer par tout un tas de démarches que les enfants ne peuvent pas faire. Là, ce qui est formidable, c’est qu’on va avoir un Défenseur des droits qui est inscrit maintenant dans la constitution et qui aura davantage de pouvoir pour les droits de l’enfant. Moi, je suis plus choquée qu’on supprime la commission de déontologie et de sécurité qui intervient sur les dérapages dans les commissariats de police, rattachons-là au défenseur des droits». Martine Brousse se sent-elle seule dans le milieu associatif à se désolidariser de Dominique Versini ? « 35 000 signatures à son appel à soutien, eh bien ce n’est rien quand on sait le nombre de militants pour les droits de l’enfant, il faut être réaliste ». En résumé, est-on confiant à la voix de l’enfant ? «De toute façon, par rapport à ce qui se passe aujourd’hui, ça ne s’annonce pas plus mal. Et, en tout cas, je le répète, le Défenseur des droits aura plus de pouvoir. Et nous ferons en sorte qu’il s’en serve ».
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