Pour Yvonne Poncet-Bonissol, psycho-clinicienne, présidente de l’Association de défense contre le harcèlement moral et spécialiste des rapports familiaux, le mal-être des enfants est en grande partie lié à celui de leurs parents et d’une société globalement trop exigeante.
« Le boom des psys pourrait laisser penser à l’émergence d’un phénomène de mode. Si ce n’est pas faux, il serait simpliste de croire que l’effet n’a pas de cause. C’est plutôt la médiatisation de ce phénomène qui peut poser problème dans le sens où certains parents peuvent attendre des professionnels qu’ils réparent les défaillances éducatives.
Mais au-delà de cela, il y a aujourd’hui un vrai malaise chez les plus jeunes. On voit émerger des symptômes, si ce n’est complètement nouveaux, du moins de plus en plus fréquents et intenses chez les enfants, et qui ressemblent étrangement à ceux des adultes. Des enfants stressés, déprimés, dépressifs même.
D’où une pandémie de troubles alimentaires, je pense notamment à l’obésité… En fait, nous nous trouvons devant des souffrances que les enfants ont toujours connues (manque de communication, manque d’écoute de la part de leurs parents) mais auxquelles s’ajoutent d’autres facteurs : leurs parents eux-mêmes, bien souvent, souffrent aussi. Ils deviennent démissionnaires parce que trop absorbés, parfois laminés par leur travail, en stress permanent, stress auquel s’ajoute la culpabilité de ne pas donner assez de temps à leurs enfants. C’est un cercle vicieux ».
« En fait, souvent, les parents consultent quand les souffrances de leurs enfants leur deviennent insupportables à eux-mêmes, quand ils ne peuvent plus se contenter de penser ou de dire « ce n’est pas grave, ça va passer ».
Il en est de même pour les enseignants, souvent prescripteurs des consultations puisqu’ils sont les premiers témoins des malaises des enfants. Et je voudrais là préciser une chose : s’il est bon de conseiller un suivi psychologique dans certains cas (surtout quand l’enfant a un vrai problème d’assimilation à l’école), les tests à outrance chez l’orthophoniste ou chez les psychomotriciens, la recherche quasi systématique d’un QI « trop » élevé ou d’un quelconque facteur « anormal » est source de bien des débordements néfastes : on place alors l’enfant dans une exigence de performance à fournir qui peut augmenter un stress déjà grandissant car n’oublions pas que l’école leur en demande toujours plus, de plus en plus jeunes.
Il n’y a pas de recette miracle. Il faut déculpabiliser les parents pour qu’ils reprennent confiance en eux pour être en mesure d’écouter leurs enfants, de communiquer avec eux mais aussi de leur donner leur place d’enfants auxquels on sait aussi dire non. La condition sine qua non à une adolescence épanouie, c’est-à-dire fondée aussi sur l’opposition à un modèle parental fort ».
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