La créativité chez l’enfant, c’est bien plus que de jolis dessins. C’est aussi ce qui l’aide à appréhender le monde qui l’entoure et à le dépasser. Alors ouvrons grand les fenêtres de la fantaisie, la porte de l’imaginaire à double battants… nos enfants ne demandent qu’à s’inventer eux-mêmes.« L’imagination est plus importante que le savoir », disait Einstein. Pourtant, quand il s’agit de déterminer le degré d’intelligence d’un individu, on se base très souvent sur le QI… qui ne prend pas en considération l’intelligence créative. Des chercheurs tentent de démontrer que les tests de QI ne reflètent que partiellement l’intelligence humaine. C’est le cas de Maud Besançon, Jacques-Henri Guignard et Todd Lubart, qui se sont penchés sur le lien entre potentiel intellectuel, éducation et créativité. Ces trois psychologues ont produit une étude passionnante qui a de quoi secouer bien des idées reçues sur l’éveil des enfants.
L’apanage des enfants doués ?
Liée en premier lieu à des facteurs conatifs (c’est à dire à certains traits de personnalité), la créativité va de pair avec « la prise de risques, l’ouverture aux nouvelles expériences, et la tolérance à l’ambiguïté », nous disent les trois chercheurs. Si les spécificités des enfants jouent un rôle, qu’en est-il du potentiel intellectuel ? En s’intéressant aux enfants présentant un haut potentiel intellectuel, ils ont démontré que la créativité n’est en aucun cas liée au QI, et qu’elle se développe indépendamment de celui-ci. L’opposition quasi systématique de l’esprit logique et l’esprit créatif semble fondée…
Une question d’éducation ?
Au-delà des prédispositions, l’environnement dans lequel évolue un enfant modèle sa créativité. Plus les parents et l’entourage donnent de l’importance à la créativité et la reconnaissent comme une qualité, plus l’enfant sera amené à développer son potentiel. De même, des parents qui envisagent la culture et l’ouverture d’esprit comme un point clé de leur éducation donneront à leur enfant les moyens d’être imaginatif : créer, c’est transformer ce qu’on connait, croiser les points de vues, reproduire ce qu’on a vu en se l’appropriant. Et plus on en connait, plus on peut créer !
Et l’école dans tout ça ?
La créativité connait des pics et des chutes, à des périodes de la vie bien particulières. Elle augmente du CP à la terminale, mais les chercheurs ont décelé deux chutes de créativité significatives : l’une survient à l’entrée au CP, la deuxième à l’entrée au lycée. Ces deux périodes correspondent à des changements importants de mode de vie et d’environnement social. Les chercheurs indiquent que l’imposition de nouvelles règles dans la vie de l’enfant inhiberait sa créativité.
A l’école, les enfants sont amenés à résoudre des problèmes fermés : il n’y a qu’une seule solution possible. C’est donc l’intelligence logique qui est privilégiée. En dehors, les problèmes sont moins linéaires et font appel à plusieurs niveaux de réflexion qui s’affrontent. Peser le pour et le contre, confronter les points de vue… L’école « classique » serait-elle un frein au développement de l’intelligence créative ?
L’école alternative
Les trois psychologues se sont intéressés aux pédagogies alternatives, notamment à la pédagogie Montessori, qui repose sur l’éducation sensorielle de l’enfant. Et la différence est significative : Les enfants en classe alternative sont bien plus à l’écoute de leur intelligence créative. « Ces différences peuvent s’expliquer par le fait que les pédagogies alternatives donnent une plus grande place à l’enfant en tant qu’individu, notamment dans l’organisation du temps de travail (…) et des activités communes. »
Favoriser la créativité à l’école ? Une idée qui ne vient pas naturellement dans les systèmes éducatifs traditionnels. Et pourtant : cela permettrait certainement de valoriser le potentiel de nos bambins, en dehors de leurs performances académiques.
La pédagogie Montessori : l’alternative qui a fait ses preuves
La pédagogie Montessori nous vient d’Italie. Maria Montessori était médecin, anthropologue et pédagogue. En 1899, alors jeune doctoresse, elle crée une école d’orthophonie accueillant des enfants déficients mentaux. C’est alors qu’elle s’éloigne radicalement les méthodes pédagogiques de son époque pour élaborer les bases de la pédagogie qui fera son succès. « Aide-moi à faire seul », résumait-elle son propos. Comment s’organise l’apprentissage dans une classe Montessori ?
– Pour permettre aux enfants de s’ouvrir les uns aux autres, les classes d’âges sont mélangées. Ils acquièrent ainsi une première expérience du groupe social : le partage est au centre de la pédagogie.
– Maria Montessori donnait aux expériences sensorielles une place importante dans le développement des capacités de l’enfant. Tous les ateliers proposés aux enfants sont donc fondés sur les cinq sens.
– Loin des programmes scolaires traditionnels, il s’agit de redonner à l’enfant sa juste place à travers l’apprentissage de l’indépendance. On n’imposer rien à l’enfant mais on lui donne plutôt les clés pour qu’il développe sa curiosité : l’enfant est acteur de son apprentissage.
La pédagogie Montessori illustrée, Murielle Lefebvre, Alban éditions (2008).
Cinq conseils pour développer la créativité de son enfant
Laissez le respirer ! En laissant à son enfant la liberté d’expérimenter ce qui l’inspire, on booste sa créativité. Pas question d’être sur son dos en permanence, de lui donner des directives à tout moment… Laissez-le s’exprimer. Ce ne sera peut-être pas un collier de nouilles qu’il vous montrera fièrement à la fin de l’après-midi, et c’est tant mieux.
Cultivez son ouverture d’esprit. Un enfant conscient des ambiguïtés du monde qui l’entoure sera plus à même de mettre en perspective les options qui s’offrent à lui. C’est aussi ça, la créativité ! Montrez à votre enfant qu’il y a plusieurs réponses possibles, plusieurs cultures, courants de pensées… Toujours à son échelle. De même, sautez sur les occasions de l’éveiller à la culture : l’art, la musique… sans lui imposer vos goûts !
Plus qu’un papier et un crayon. Donnez-lui la possibilité d’expérimenter toutes les formes d’expression. Vous avez peur qu’il se salisse, ou qu’il s’exprime un peu trop près de votre vase Ming ? Prenez les devants : Protégez un coin de la maison pour en faire un terrain de jeu éphémère, il pourra s’exprimer sans refaire la déco du salon.
Encouragez-le. Montrez à votre enfant que vous appréciez ses élans créatifs. Sans forcément afficher toutes ses œuvres sur les murs, il est important que votre enfant sente que sa créativité est ressentie comme une qualité.
Soyez spontané ! N’imposez pas à votre enfant un moment que vous aurez choisi pour les loisirs créatifs. L’imagination, ça ne se commande pas ! Laissez le trouver le moment où créer sera un plaisir, et allez dans le sens de ses goûts. C’est seulement ainsi qu’il développera son potentiel.