Le ministère de l’Education nationale va mettre en place à partir du mois de novembre une évaluation des enfants « à risque » dès la maternelle.
Alors que dans le primaire, des évaluations ont déjà lieu en CE1 et en CM2, le gouvernement en veut aussi en maternelle. Le projet s’intitule « Aide à l’évaluation des acquis en fin d’école maternelle » et s’adresse aux enseignants qui auront pour mission de « repérer » leurs élèves qui risquent d’avoir des difficultés scolaires.
Pour se faire, le ministère mettra à leur disposition un livret d’évaluation en trois phases. Entre novembre et décembre, une première phase dite de « repérage » : l’enseignant passerait au crible le comportement à l’école, le langage, la motricité et la « conscience phonologique » des élèves. La deuxième phase consisterait en un « entraînement progressif (…) avec les enfants repérés à risques lors de la phase 1 ». Enfin, une étape bilan, entre mai et juin, permettrait de faire le point sur les acquis des élèves par des « séries d’épreuves collectives ou en petits groupes, d’une durée d’environ trente minutes par série ».
Ainsi les enfants pourront être classés en trois catégories : « RAS » (pour « rien à signaler »), « risque » et « haut risque ». Le ministère va soumettre le projet aux inspecteurs d’académie.
Un fichage pour les syndicats
C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour les syndicats. « Nous appelons le ministre (Luc Chatel) à revenir à la raison. La maternelle n’est pas un lieu de compétition, de tri et de sélection », a dit à l’AFP Sébastien Sihr, du SNUipp-FSU, principale syndicat du primaire.
Pour la FCPE, première fédération de parents d’élèves, « on colle une étiquette extrêmement anxiogène sur des enfants ». Même constat pour Pierre Frackowiak, inspecteur honoraire de l’éducation nationale : « L’évaluation gangrène tout le système. La place que la maternelle accordait au jeu, au plaisir quotidien, me semble aujourd’hui fortement menacée par ce type de procédé. »
Le 14 septembre, le Haut Conseil de l’éducation rendait un rapport assassin dans lequel il remettait en cause l’ensemble du système actuel d’évaluation. Il préconisait de « confier à une agence indépendante la mise en œuvre » des évaluations des acquis des élèves, estimant « essentiel que, dans notre démocratie, les données concernant les résultats de notre système éducatif soient objectives et transparentes, donc incontestables ». Les syndicats ont lancé une pétition. Le ministère de l’Education nationale, que nous avons interrogé, est incapable de dire si ces évaluations seront accompagnées de moyens et de dispositifs de remédiation pour prendre en compte les élèves qui seraient repérés « à risque ».