Réforme de la formation oblige, près de 16 000 nouveaux professeurs se retrouveront cette année en charge d’une classe sans avoir jamais fait face à aucun élève. Les syndicats grondent, l’Education nationale bricole, les élèves attendent.
A peine l’année commencée que les grèves reprennent. Le syndicat Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, annonce une journée de mobilisation le 6 septembre. « Le contexte n’est absolument pas traditionnel. La rentrée va être exceptionnelle dans le sens où elle va accumuler tous les défauts et tous les problèmes ».
En plus des traditionnels soucis liés à la retraite, les revendications portent cette année sur la formation des nouveaux professeurs. « On les lâche sans formation, dans les plus mauvaises conditions. Les profs le ressentent comme une marque de mépris à l’égard de leur métier », explique Frédérique Rolet, cosecrétaire générale du syndicat.
La réforme des IUFM laisse en effet les professeurs de 2010 dans une situation particulière : titulaires du diplôme, ils auraient du entamer une formation de deux ans en IUFM. Les IUFM étant supprimés, les petits nouveaux entreront directement en fonction à la rentrée, une grande partie n’ayant jamais été confronté à une classe. Cette lacune devrait être comblée dès l’année prochaine, puisqu’une formation sera dispensée sous forme de stage avant l’obtention du diplôme.
Prof ou élève ?
Mais que faire des 16000 professeurs malchanceux, en poste et pas forcément compétents ?
Pour combler ce manque de formation, des sociétés privées viennent « en aide » au gouvernement. Ainsi, la société Forprof, dédiée jusque là à la préparation du concours, proposait cet été des stages de formation au métier de professeur, le minimum pour réussir la fatidique « première quinzaine » de la rentrée. Des stages finalement annulés, faute de candidats ! « Les étudiants étaient heureux d’avoir eu le concours, ils sont partis en vacances. Ils ont confiance en l’Education nationale pour ne pas les abandonner ! », explique Patrick Foglia, créateur de Forprof. Le prix moyen des stages, 450 euros, a peut être également joué dans la balance…
D’après Patrick Foglia, l’Education nationale n’est pas a blâmer pour les cafouillages de la rentrée, tout ayant été mis en œuvre pour aider les futurs professeur. On peut toutefois regretter que toutes les mesures aient été prises au cours des deux derniers mois, en pleine période de vacances…
Dans les faits, les nouveaux professeurs devraient être accompagnés par un tuteur durant les 7 premières semaines de cours, de façon à être prêt pour agir seul en novembre, après les vacances de la Toussaint. Cependant, d’après le syndicat Snes-FSU, les professeurs tuteurs ne seraient pas assez nombreux pour s’occuper de tous les nouveaux professeurs. « C’est un métier très difficile, voire ingérable, explique Patrick Foglia. Chaque année, il y’a 30% des nouveaux professeurs qui n’ont besoin de personne pour s’en sortir, 60% qui ont besoin d’aide, et 10% qui auront besoin d’aide durant des années ».
Cette année, pour réussir, les élèves devront, comme d’habitude, travailler, et faire confiance au hasard.