Première consultation gynécologique : pas de panique !

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Parler de sexualité n’est pas chose aisée pour les adolescentes. Surtout à un professionnel de santé qu’elles rencontrent pour la première fois : le gynécologue. Voici quelques pistes pour rassurer votre fille en vue de cette première consultation qui a son importance.

« J’ai trouvé plein d’infos sur internet, ça suffit pas ? » « Il parait que l’examen fait super mal, c’est vrai ? » « A partir de quel âge on peut consulter ? » « Je peux venir accompagnée ? » Toutes ces questions, l’association Sparadrap y répond dans un guide à destination des jeunes filles. L’association, qui a pour vocation d’éditer des documents pour guider les enfants dans le monde de la santé, a été créée il y a bientôt dix ans par des professionnels de santé et des parents. Ses axes d’action : informer les enfants et de leur famille sur les questions de santé ; donner une place importante aux parents d’enfants hospitalisés ; prendre en compte la douleur de l’enfant. Elle s’adresse cette fois aux ados, pour les rassurer sur un examen qui inquiète beaucoup d’entre elles : et pour cause, il s’agit de la première consultation gynécologique.

Ce guide, qui rassure, sans banaliser les inquiétudes des jeunes filles, est disponible depuis le mois de juillet auprès des infirmières scolaires, des centres de planification, du planning familial, des professionnels de santé (médecins généralistes, gynécologues) et des associations qui en ont fait la demande. L’occasion d’aborder la question avec deux spécialistes.

« Tu te poses des questions, va les poser ; L’examen médical n’est pas obligatoire. »

Catherine Devoldère est pédiatre et chef?de pédiatrie au centre hospitalier d’Abbeville (80). Présidente de l’association Sparadrap, elle a créé à Abbeville une consultation spécifiquement dédiée aux jeunes, Espace santé ados. « On sait que les ados manquent d’information sur la sexualité : ils sont informés seulement sur la contraception et les MST en milieu scolaire, mais c’est tout. Il manquait quelque chose », note-t-elle.

Depuis la création de sa « cellule ados », la pédiatre est très surprise de constater que les ados se posent énormément de questions, mais n’osent pas aller voir un médecin. « Pour les questions personnelles, l’école n’est pas le lieu. Avec le généraliste, ce n’est pas toujours facile de les aborder. Et les parents ne sont pas toujours sollicités ; s’ils le sont, ils n’ont pas toujours les bons mots. Résultat, les jeunes filles sont très mal informées ! Donc il reste internet et les copines, et on sait bien que ce n’est pas là qu’on trouve la meilleure information… »

Qu’est ce qui inquiète tant les jeunes filles ? Pour mieux appréhender la question, il est important de prendre en considération leur stress. « La première consultation est une source d’inquiétude énorme. Le message fort qu’il faut leur transmettre, c’est : ‘tu te poses des questions, va les poser ; l’examen médical n’est pas obligatoire’ », explique Catherine Devoldère. « Il faut pouvoir les rassurer, leur donner la parole, les autoriser à poser leurs questions et à faire leurs propres choix. »

« Elles sont à moitié rassurées. Mais heureusement, pas terrorisées ! »

Sylvain Mimoun est gynécologue, andrologue et psychosomaticien. Auteur de Ados, amour et sexualité (aux éditions Albin Michel), il a répondu à nos questions.

 


En moyenne, à quel âge intervient la première consultation gynécologique ?

La plupart du temps, vers 16 ou 17 ans, mais quelques fois cela peut intervenir à 13, 14 ans. Tout dépend si elles se sentent concernées par la sexualité ou non. Il peut aussi arriver qu’elles viennent pour un problème non gynécologique, par exemple l’acné. Dans ce cas, c’est souvent le dermatologue qui les envoie pour un traitement hormonal. Au quel cas, les questions de sexualité seront abordées plus tard.

En général, soit c’est leur mère qui les conseille d’aller voir son gynécologue, ce qui peut aider la jeune fille dans la mesure où il s’agit d’un endroit de confiance ; sinon, elles viennent de leur propre chef, et ce sont alors souvent les copines qui les conseillent.

Dans quel état d’esprit sont les jeunes filles pour cette première consultation ?

 

Elles sont en général à moitié rassurées. Mais heureusement, pas terrorisées ! Quelques fois elles viennent en groupe de copines, ça les rassure. Pour ma part, il n’est pas rare que je les fasse toutes entrer ensemble dans le cabinet. Elles sont plus à l’aise, elles se sentent moins seules et donc le débat est plus ouvert : en répondant à mes questions de manière générale, elles se sentent plus en confiance pour parler de ce qui les inquiète personnellement.

Quelles sont leurs principales sources d’inquiétude ?

La motivation en général, c’est la contraception. Parfois elles veulent la même pilule que la copine, souvent elles ont peur de grossir. Si elles ont de l’acné elles veulent une contraception qui fait d’une pierre deux coups. Parfois, elles ont peur de l’examen gynécologique : même sans le dire, elles le montrent. C’est important qu’elles sachent que ce n’est pas du tout obligatoire à la première consultation. Certaines ont peur de ne pas être « normales », et préfèrent passer le premier examen tout de suite, ça les rassure.

Y a-t-il un moment idéal pour le premier examen ?

 

Non, il faut le faire quand la jeune fille est prête. Certaines jeunes filles ne le font pas avant vingt-cinq ans ! En tous cas, plus elles s’en font une montagne, plus c’est compliqué. Alors que dans la grande majorité des cas, tout se passe très bien.

« Les ados sont terriblement mal informés sur la question, il faut que ça change ! »

Comment rassurez-vous les jeunes filles très stressées à l’idée de ce premier examen ?

Je leur dis qu’on ne fera jamais de forcing, et je leur fait un dessin pour leur expliquer comment ça se passe et leur montrer que ce n’est pas douloureux. A celles qui ont très peur, je suggère d’essayer toutes seules, pour dédramatiser la chose.

Et l’examen des seins ?

C’est l’examen le plus rapide, ça leur fait beaucoup moins peur parce que c’est moins intime pour elles. Parfois, ça peut être utile de se limiter à cela pour les rassurer et poursuivre le dialogue avec le médecin.

Quelles idées reçues ont-elles sur la contraception ?

Soit les copines leur disent qu’elles ont grossi, et elles se disent que ça va être pareil pour elles : c’est bien pour ça qu’il ne faut pas prendre la même pilule que la copine ! Soit la famille les influence à penser qu’une contraception n’est pas bonne pour elles. Par exemple, si la mère est anti-hormones, la jeune fille va souvent être très réticente à la pilule, en répétant l’argumentaire de la maman. Il faut savoir d’où elles partent, mais surtout ce qu’elles cherchent, elles. Le but est de leur donner une information aussi objective que possible.

Vous avez participé à l’élaboration des sites educationsexuelle.com et educationsensuelle.com. Pensez-vous que les jeunes filles soient mal informées sur la sexualité ?

Oui, clairement ! Aborder les choses avec sensualité, mais aussi parler d’une part aux parents de l’autre aux ados, permet d’actualiser le discours. Les ados sont terriblement mal informés sur la question, il faut que ça change !

Quelle influence a selon vous la pornographie sur la vision de la sexualité des jeunes filles ?

La plupart du temps, pas une grande influence, tout simplement parce que les filles en regardent beaucoup moins que les garçons. En tous cas, le plus important pour les adultes, c’est de ne pas dramatiser les choses, et de savoir répondre à ses questions plutôt que de l’enfermer dans un « ta vie est foutue ! ». Si on avance comme ça, tout devrait bien se passer !

L’éducation sexuelle sur le web

Deux nouveaux sites internet dédiés à l’éducation sexuelle, réalisés par des experts, viennent de naître sur la toile.

 

Affaire de famille ou devoir de l’école ? L’éducation sexuelle est bloquée entre les deux… Béatrice Copper-Royer, psychologue et co-fondatrice d’e-enfance, Anne de Kervasdoue et Sylvain Mimoun, gynécologues, ainsi que Christian Spitz, pédiatre, se sont penchés sur la question, et ont mis au point deux sites.

 

www.educationsexuelle.com

Ce site est destiné aux parents : il leur explique tout ce qu’ils ont besoin de savoir sur la sexualité de leurs ados. Il est gratuit, et accompagne les parents dans leur démarche pédagogique.

www.educationsensuelle.com

Destiné aux adolescents, mais aussi aux jeunes adultes, ce site parle de sexualité, mais pas que : pour leur faire comprendre que la pornographie n’est pas une représentation de la sexualité qui correspond à la réalité, le site propose un parcours de 7 films pédagogiques pour les guider et les informer sur la sexualité, la sensualité, et le respect de l’autre.

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